Paroles et traduction Michel Jonasz - La mémoire et la mer

La mémoire et la mer

La marée, je l'ai dans le cœur
Qui me remonte comme un signe
Je meurs de ma petite sœur, de mon enfance et de mon cygne
Un bateau, ça dépend comment
On l'arrime au port de justesse
Il pleure de mon firmament
Des années lumières et j'en laisse
Je suis le fantôme jersey
Celui qui vient les soirs de frime
Te lancer la brume en baiser
Et te ramasser dans ses rimes
Comme le trémail de juillet
Où luisait le loup solitaire
Celui que je voyais briller
Aux doigts de sable de la terre
Rappelle-toi ce chien de mer
Que nous libérions sur parole
Et qui gueule dans le désert
Des goémons de nécropole
Je suis sûr que la vie est là
Avec ses poumons de flanelle
Quand il pleure de ces temps là
Le froid tout gris qui nous appelle
Je me souviens des soirs là-bas
Et des sprints gagnés sur l'écume
Cette bave des chevaux ras
Au raz des rocs qui se consument
Ö l'ange des plaisirs perdus
Ö rumeurs d'une autre habitude
Mes désirs dès lors ne sont plus
Qu'un chagrin de ma solitude
Et le diable des soirs conquis
Avec ses pâleurs de rescousse
Et le squale des paradis
Dans le milieu mouillé de mousse
Reviens fille verte des fjords
Reviens violon des violonades
Dans le port fanfarent les cors
Pour le retour des camarades
Ö parfum rare des salants
Dans le poivre feu des gerçures
Quand j'allais, géométrisant,
Mon âme au creux de ta blessure
Dans le désordre de ton cul
Poissé dans des draps d'aube fine
Je voyais un vitrail de plus,
Et toi fille verte, mon spleen
Les coquillages figurant
Sous les sunlights cassés liquides
Jouent de la castagnette tans
Qu'on dirait l'Espagne livide
Dieux de granits, ayez pitié
De leur vocation de parure
Quand le couteau vient s'immiscer
Dans leur castagnette figure
Et je voyais ce qu'on pressent
Quand on pressent l'entrevoyure
Entre les persiennes du sang
Et que les globules figurent
Une mathématique bleue,
Sur cette mer jamais étale
D'où me remonte peu à peu
Cette mémoire des étoiles
Cette rumeur qui vient de là
Sous l'arc copain où je m'aveugle
Ces mains qui me font du fla-fla
Ces mains ruminantes qui meuglent
Cette rumeur me suit longtemps
Comme un mendiant sous l'anathème
Comme l'ombre qui perd son temps
À dessiner mon théorème
Et sous mon maquillage roux
S'en vient battre comme une porte
Cette rumeur qui va debout
Dans la rue, aux musiques mortes
C'est fini, la mer, c'est fini
Sur la plage, le sable bêle
Comme des moutons d'infini...
Quand la mer bergère m'appelle

The Tide and the Sea

The tide, I have it in my heart
Which lifts me up like a sign
I'm dying of my little sister, my childhood, and my swan
A boat, it depends how
We moor it at the port just right
It weeps from my firmament
Light years and I leave some
I am the Jersey phantom
The one who comes on fancy nights
To throw the mist at you as a kiss
And to pick you up in his rhymes
Like the July trammel
Where the solitary wolf glistened
The one I saw shining
On the sandy fingers of the earth
Remember that dogfish
That we released on parole
And who yells in the desert
Of the seaweed necropolis
I'm sure that life is there
With its lungs of flannel
When it cries from those times
The gray cold that calls us
I remember the evenings there
And the sprints won on the foam
This drool of shorn horses
Level with the rocks that burn
Oh angel of lost pleasures
Oh rumors of another habit
My desires from then on are nothing more
Than a sorrow of my solitude
And the devil of the conquered evenings
With its pale rescues
And the shark of paradises
In the wet environment of moss
Come back green girl of the fjords
Come back violin of the violinades
In the port, the horns blare
For the return of the comrades
Oh rare fragrance of the salt marshes
In the fiery pepper of the chapped skin
When I went, geometrizing,
My soul into the hollow of your wound
Into the disorder of your ass
Tarred in sheets of fine dawn
I saw one more stained glass window,
And you green girl, my spleen
The seashells representing
Under the broken liquid sunlight
Playing the castanets tan
That look like livid Spain
Granite gods, have pity
On their vocation for finery
When the knife comes to meddle
In their castanet figure
And I saw what we sense
When we sense the glimpse
Between the blinds of the blood
And that the globules figure
A blue mathematics
On this sea never calm
From which gradually rises to me
This memory of the stars
This rumor that comes from there
Under the friendly arch where I blind myself
These hands that make me flutter
These ruminating hands that bellow
This rumor follows me for a long time
Like a beggar under the anathema
Like the shadow that wastes its time
In drawing my theorem
And under my red makeup
Comes to pound like a door
This rumor that stands upright
In the street, to the dead music
It's over, the sea, it's over
On the beach, the sand bleats
Like sheep of infinity...
When the shepherdess sea calls me