Paroles et traduction Serge Reggiani - Adèle

Adèle

Elle attend devant la caserne
De l′aube aux derniers feux du jour.
Parfois le drapeau est en berne
Mais jamais, jamais son amour.
Elle guette un regard, un souffle,
Un pas, un geste, une ombre, un rien
Mais ne croyez pas qu'elle souffre:
Elle l′aime, il vit, tout va bien
Et tout ce brouillard dans sa tête
Le soir a des parfums lilas
Le sergent de garde répète:
"Non, le lieutenant n'est pas là!"
Mais ce lieutenant, elle l'aime
Du fond de son rêve indigo,
Plus qu′elle, plus que son père même,
Elle s′appelle Adèle Hugo
Et toi, devant la mer profonde,
Toi, poète et proscrit, tu sais
Qu'il existe, hélas, dans ce monde
D′autres exils que Guernesey.
Et toi, le rêveur solitaire,
Tu vois de ton regard géant
Qu'il existe, hélas, sur la Terre
D′autres gouffres que l'océan
Elle a oublié la rancune
Et l′amertume et le devoir.
Elle n'est plus jamais quelqu'une
Que pour parfois, l′apercevoir.
Elle est une petite chose
Qui s′est tout abîmée en lui.
Une lente métamorphose
Fait d'elle un papillon de nuit.
Et toi, devant la mer profonde,
Toi, poète et proscrit, tu sais
Qu′il existe, hélas, dans ce monde
D'autres exils que Guernesey.
Et toi, le vieux prophète triste,
Qui as combattu l′échafaud,
Tu sens bien, hélas, qu'il existe
D′autres morts que celle à la faux
D'autres morts que celle à la faux!

Adèle

She waits outside the barracks
From dawn to the last light of day.
Sometimes the flag is at half-mast
But never, never her love.
She watches for a glance, a breath,
A step, a gesture, a shadow, a nothing
But don't think she's suffering:
She loves him, he's alive, all is well
And all that fog in her head
In the evening has lilac scents
The sergeant on guard repeats:
"No, the lieutenant is not here!"
But this lieutenant, she loves him
From the depths of her indigo dream,
More than herself, more than her own father,
Her name is Adèle Hugo
And you, before the deep sea,
You, poet and outcast, you know
That there are, alas, in this world
Exiles other than Guernesey.
And you, the solitary dreamer,
You see with your giant gaze
That there are, alas, on Earth
Abysses other than the ocean
She has forgotten the grudge
And the bitterness and the duty.
She is no longer anybody
Except to sometimes catch a glimpse of him.
She is a little thing
Who has completely lost herself in him.
A slow metamorphosis
Makes her a moth.
And you, before the deep sea,
You, poet and outcast, you know
That there are, alas, in this world
Exiles other than Guernesey.
And you, the old sad prophet,
Who fought the scaffold,
You feel well, alas, that there are
Other deaths than that of the scythe
Other deaths than that of the scythe!