Текст и перевод песни Serge Reggiani - Le souffleur

Le souffleur

Dans ma guérite à mi-chemin,
Entre la cour et le jardin,
Sous mon minable projecteur,
Je suis le premier spectateur.
Je suis souffleur.

Pendant que ceux d′en haut s'agitent,
Malgré leurs rhumes et leurs bronchites,
Moi je relis pendant deux heures
Un texte que je sais par cœur
... et moi seul, d′ailleurs.

Rodrigue n'est pas si mauvais,
Mais il joue vieux, il joue français.
Quant à Chimène, elle ferait mieux
De se faire faire un gosse ou deux.
C'est pas sérieux.

Tiens si j′avais joué à la place
De Don Diègue ou de Don Gormas,
On ne se serait pas ramassé
A Epinal au Colisée.
En voilà assez.

Moi, je veux brûler les planches,
Je veux prendre ma revanche
Et crouler sous l′avalanche
Des cris et des bravos
Que j'entends dans mon dos.

Grâce à moi la troupe entière
Va enfin faire une carrière.
Elle va être la première.
Mais y a ce con de producteur
Qui n′a jamais vu mon talent d'acteur

Ça me fait mal de voir ce vieux serpent
Plus qu′au trois-quarts gâteux
Lancer: "Rodrigue, as-tu du cœur?"
Comme il dirait: "Avez-vous l'heure?".
Je suis souffleur

Tiens, moi j′y mets rien qu'en soufflant
Beaucoup plus d'âme, plus d′élan.
Y a même des soirs où sans malice,
Les gens des premiers rangs frémissent,
Ils crient presque bis.

Moi, je veux brûler les planches,
Je veux prendre ma revanche
Et crouler sous l′avalanche
Des cris et des bravos
Que j'entends dans mon dos.

Je vois déjà des critiques,
Des papiers dithyrambiques,
Et personne ne s′explique
Comment ce con de producteur
N'avait rien vu de mon talent d′acteur.

Remarque que Don Diègue boit
... beaucoup... et même plus que moi.
Un jour il aura quelque chose de pas joli,
Le genre cirrhose.
Qu'il se repose.

Il y a quelqu′un tout près de lui,
Quelqu'un qui l'aide et qu′il oublie,
Qui a envie de prendre l′air,
De faire le chemin à l'envers,
De voir la lumière.

Et qui va brûler les planches,
Qui va prendre sa revanche,
Et crouler sous l′avalanche
Des cris et des bravos
Que j'entends dans mon dos.

Je me vois à l′avant-scène
Devant le public que j'aime
Saluant, et je vois même
Ce pauvre con de producteur
Venir me dire qu′il attendait mon heure.

The Prompter

In my booth halfway,
Between the courtyard and the garden,
Under my shabby spotlight,
I'm the first spectator.
I am the prompter.

While those above are bustling,
Despite their colds and bronchitis,
I reread for two hours
A text I know by heart
... and me alone, by the way.

Rodrigo isn't so bad,
But he plays old, he plays French.
As for Chimène, she would do better
To have a kid or two.
It's not serious.

Hey, if I had played instead
Of Don Diego or Don Gormas,
We wouldn't have ended up
In Epinal at the Colosseum.
Enough of that.

Me, I want to burn the boards,
I want to take my revenge
And crumble under the avalanche
Of shouts and bravos
That I hear behind my back.

Thanks to me, the whole troupe
Will finally make a career.
She's going to be the best.
But there's this idiot producer
Who has never seen my talent as an actor.

It hurts me to see this old snake
More than three-quarters senile
Launch: "Rodrigo, do you have a heart?"
As he would say: "Do you have the time?".
I am the prompter.

Here, I put in nothing but blowing
Much more soul, more momentum.
There are even evenings where without malice,
The people in the front rows tremble,
They almost scream encore.

Me, I want to burn the boards,
I want to take my revenge
And crumble under the avalanche
Of shouts and bravos
That I hear behind my back.

I already see reviews,
Dithyrambic papers,
And nobody explains
How this idiot producer
Had seen nothing of my talent as an actor.

Notice that Don Diego drinks
... a lot... and even more than me.
One day he will have something not pretty,
The cirrhosis kind.
Let him rest.

There is someone very close to him,
Someone who helps him and whom he forgets,
Who wants to take the air,
To go the other way,
To see the light.

And who will burn the boards,
Who will take his revenge,
And crumble under the avalanche
Of shouts and bravos
That I hear behind my back.

I see myself at the front of the stage
In front of the audience I love
Bowing, and I even see
This poor idiot producer
Come and tell me that he was waiting for my time.